A la uneCoopérationEconomie

Agropole au Togo: l’expérience Sud-Coréenne et un très fort engagement politique

En septembre 2015, les 197 pays membres des Nations Unies dont le Togo étaient unanimes sur le fait que « Transformer le monde à l’horizon 2030, c’est assurer la viabilité des systèmes de production alimentaire et la mise en œuvre des pratiques agricoles résilientes qui permettent d’accroître la productivité et la production ». Et cela passera incontestablement par un changement de paradigme en l’occurrence le développement industriel dans le secteur agricole. Le Togo a trouvé sa voie. Laquelle ? Eléments de réponse.

Avec 40% de contribution au PIB-produit intérieur brut national, l’agriculture demeure un secteur à fort potentiel de croissance pour le Togo. Illustration du renforcement sur les dix dernières années de la politique agricole du pays.

Du projet d’Appui au Secteur Agricole (PASA) au Programme national d’investissement agricole et de sécurité alimentaire (PNIASA) en passant par le Projet d’Appui au Développement Agricole au Togo (PADAT) et le Programme de Productivité Agricole en Afrique de l’Ouest Projet-Togo (PPAAO-Togo), beaucoup d’investissements ont été consentis par le pays avec l’appui des partenaires classiques, comme le FIDA, la BAD, la Banque Mondiale notamment.

Mais le décollage semble marquer le pas.

Le taux de pauvreté tourne toujours autour de 50% en 2018 avec des disparités selon les régions. A cela, s’ajoutent des difficultés de garantie de la production locale en lien avec la sécurité alimentaire.

Face à ce tableau qui contraste avec les efforts consentis, le Gouvernement Togolais a décidé d’agir en prenant exemple sur la Corée du Sud qui a traversé il y a plus de quarante (40) années, une situation similaire.

Lire aussi : Emploi : l’Agence de développement des Agropoles au Togo recrute son Directeur général

« Afin de lutter efficacement contre la vulnérabilité, le dénuement et leurs corollaires, le Togo a pris l’option de placer les petits producteurs agricoles au cœur du modèle de développement agricole. Particulièrement dans le contexte du changement climatique actuel l’atteinte des nobles objectifs dépend du renforcement de la résilience des acteurs agricoles à travers des échanges d’expériences réussies », a circonstancié le premier ministre, Komi Sélom Klassou lors d’une rencontre technique avec des partenaires.

Modèle de développement sud-coréen

Il est difficile d’expliciter en quelques lignes le modèle de développement sud-coréen, souligne Jeune Afrique dans un article consacré au développement de la Corée du Sud.

Pour faire passer son produit intérieur brut par habitant d’une cinquantaine de dollars après la guerre de Corée à près de 30 000 dollars aujourd’hui, Séoul a mis en œuvre un certain nombre de priorités qui  pourraient se résumer ainsi :

Un très fort leadership politique,
Un culte de l’entrepreneuriat,
Un investissement sans limite dans l’éducation, et
Une stratégie industrielle à la fois originale et unique.

À la différence de Singapour, qui a misé sur son statut de ville-port pour se transformer en un hub à la fois logistique et financier, ou de la Chine, dont les moyens immenses liés à sa taille, à son peuplement et à ses richesses naturelles lui ont permis de se développer tous azimuts, la Corée du Sud a porté tous ses efforts sur une industrialisation massive entièrement tournée vers l’exportation. L’étroitesse de son marché intérieur (une trentaine de millions d’habitants dans les années 70) aurait en effet rendu impossible tout processus tourné vers la satisfaction unique des besoins nationaux.

Comment le Togo peut-il s’inspirer de la Corée du Sud?

Pour le ministre de l’agriculture Togolais, Ouro-Koura Agadazi, quand on veut s’inspirer du développement fulgurant de la Corée du Sud, il y a lieu de rechercher une transposition du modèle sud-coréen qui a été développé, pour accélérer la croissance économique du Togo. Ainsi, prendre exemple sur le modèle économique de ce petit pays asiatique, onzième puissance économique mondiale, consiste à changer de paradigme, notamment à mettre l’accent sur une stratégie de transformation agroalimentaire. La voie semble trouvée avec l’approche agropole.

Lire aussi : Programme Agropole : Le Togo et la Fondation Saemaul Globalisation de la Corée scellent un partenariat

Un partenariat « informel » noué avec les dirigeants Coréens a permis à la fondation Saemaul Globalisation qui a été à l’origine du décollage de ce pays asiatique, de s’engager à partager ses expériences avec le Togo.

 « C’est grâce à la fondation Saemaul Globalisation que la Corée a pu, en un temps record, moderniser la communauté rurale qui était au plus bas niveau de développement, et éradiquer la pauvreté ainsi que la famine qui duraient de génération en génération », a confié à 24heureinfo, le président de la Fondation Chang Donghee. « Le changement de mentalité qui prône la diligence, l’auto-assistance et la coopération, a permis l’essor de l’économie coréenne connue comme « miracle du fleuve Han ». C’est ainsi que la Corée a pu changer de sa position d’un pays bénéficiaire d’aide à un pays donateur », ajoute-t-il.

Ainsi, dans la perspective du démarrage du programme des Agropoles du Togo, la Fondation sud-coréenne et le gouvernement Togolais ont travaillé étroitement en 2018 pour la première formation en Corée des responsables du projet, assure un expert Coréen.

Des études de faisabilité et d’implantation des agropoles en lien avec le modèle Coréen au Togo ont été menées.


Le président de la Fondation (à gauche) et le ministre des finances (à droite) lors de la signature d’un partenariat autour des Agropoles à Lomé

L’engagement des deux parties a conduit le vendredi 18 janvier à une signature de convention de partenariat à Lomé entre le ministre des finances du Togo, Sani Yaya et le président de la Fondation Saemaul Globalisation Chang Donghee lors d’un séminaire conjoint.

Agropole, expertise Coréenne

En effet, dans le processus d’implantation des agropoles, la Corée du Sud à travers la fondation Saemaul va intervenir essentiellement sur le volet de renforcement des capacités des villageois et des paysans et l’amélioration de l’environnement à travers la formation agricole.

Photo de famille officiels Togolais et dirigeant de la fondation Coréenne

« La Corée du Sud s’est décidée au-delà de l’apport financier de 2.7 milliards F Cfa à venir partager son expérience en matière de développement du capital humain en se basant sur trois valeurs : la culture du goût du risque, le goût du travail et le développement de la chaîne de solidarité qui met l’accent sur une réussite collective », a expliqué le Colonel Ouro-Koura Agadazi.

Lire aussi : Programme des agropoles au Togo : voici les lieux d’implantation dans chaque région

Pour ce fin connaisseur du secteur agricole Togolais, l’objectif du Concept Agropole est de réduire la pauvreté en zone rurale comme l’indique si bien l’ODD 2 et de renforcer les capacités des communautés à promouvoir leur propre développement, avec l’accent sur la création de richesses dans leur milieu de résidence afin d’éviter l’exode rural.

L’approche agropole est une initiative innovante du gouvernement qui consiste à créer des écosystèmes agro-économiques sur toute l’étendue du territoire national. Le programme Agropole est exécuté suivant l’axe 2 du plan national du développement (PND, 2018-2022).

Lire aussi : Agropole de Kara : les experts de la Fondation Sud Coréenne sur terrain

« Le programme Agropole au Togo vise au renforcement des capacités des villageois pour une approche production de qualité et la mise en place des organisations communautaires pour renforcer l’autonomie des villages en vue de mieux vivre et de devenir un village bon à vivre », a souligné le président de la Fondation, Chang Donghee qui appelle à mettre le pied sur l’accélérateur vers la réalisation des objectifs.

Le gouvernement Togolais reste engagé, a assuré le premier ministre, et offrira son assistance aux experts Coréens en route pour le premier site de Kara (420 Km de Lomé) dans le cadre des échanges avec les 10 villages bénéficiaires directs.

Sur 64 milliards de Financement, 35 milliards ont été mobilisés, a confirmé le ministre de l’Economie et des Finances, Sani Yaya. Ces fonds sont répartis entre le gouvernement qui a réuni plus de 6 milliards F Cfa,  obtenu 10 milliards F Cfa sous forme de prêt de la Banque  Ouest Africaine de Développement (BOAD), 2,7 milliards F Cfa de la part de la Fondation Coréenne, et le reste du secteur privé et de la BAD-Banque Africaine de développement.

Outre l’agropole de Kara en phase pilote, neuf autres verront le jour notamment dans l’Oti dans la région des savanes, dans le Haut-Mono et du Centre pour le compte de la Région centrale.

Au niveau de la Région de plateaux, on aura les agropoles du Moyen-Mono, de la Zone forestière et de la pénéplaine et enfin, dans la Région Maritime, les agropoles du Bas Mono, du Littoral et de la Zone spéciale du lac.

Un agropole, pour rappel, est une zone d’activité à vocation agricole ou agro-industrielle et logistique, qui regroupe plusieurs acteurs de taille et de niveau technique et technologique variable, évoluant sur une ou plusieurs filières agricoles ciblées et axées sur la rentabilité à plusieurs niveaux.

Chaque agropole est constituée de parcelles de production et d’un agroparc décliné en usines, bureaux, logements, des infrastructures sociocommunautaires et des services d’appui.

Moulika Sant’Anna

Articles similaires

Laisser un commentaire

Bouton retour en haut de la page