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RDC : Felix Tshisekedi et la tentation d’une révision constitutionnelle

En République démocratique du Congo (RDC), l’idée d’une modification de la Constitution, qui circulait depuis plusieurs mois dans les coulisses du pouvoir, alimente désormais les débats. Le président Félix Tshisekedi a officiellement annoncé, le 23 octobre dernier à Kisangani, son intention de mettre en place dès 2025 une commission regroupant des représentants de différentes couches de la société pour rédiger une nouvelle Constitution.

Selon le président, réélu en décembre 2023 pour un second et dernier mandat, ainsi que des membres de son parti, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), l’actuelle Constitution de 2006 n’est plus adaptée aux réalités de la RDC. Il est donc urgent, selon eux, d’opter pour une nouvelle loi fondamentale qui ne constitue pas un frein au fonctionnement du pays. Plusieurs articles sont jugés problématiques, notamment ceux limitant les mandats présidentiels. La Constitution actuelle est également critiquée pour sa complexité, notamment dans l’élection des gouverneurs de province et la mise en place des institutions. On lui reproche même d’avoir été rédigée hors du territoire congolais.

Cette initiative a immédiatement éveillé les soupçons de l’opposition et suscité des réactions au sein de la société civile congolaise, qui redoute une manœuvre pour permettre un éventuel troisième mandat.

Tshisekedi avec le vent en poupe ?

Curieusement, c’est cette même Constitution qui a permis à Tshisekedi d’accéder à la magistrature suprême, non pas une, mais deux fois. Et pourtant, elle est aujourd’hui remise en question. En choisissant Kisangani, ville où une partie des travaux ayant conduit à la loi fondamentale de 2006 s’étaient tenus, Tshisekedi entretient un symbole fort. Cependant, malgré sa détermination affichée, ce projet ne s’annonce pas sans obstacles.

Malgré une large majorité au Parlement, Tshisekedi pourrait faire face à des résistances. Comme le rappelle un proverbe africain : « Ce n’est pas parce que l’oiseau est petit qu’il faut le manger avec ses plumes. »

Une bataille rangée en vue ?

Parmi les dispositions de l’actuelle Constitution en ligne de mire figure l’article 217, qui stipule que « La République démocratique du Congo peut conclure des traités ou des accords d’association ou de communauté comportant un abandon partiel de souveraineté en vue de promouvoir l’unité africaine ». Lors d’un meeting à Lubumbashi le 16 novembre dernier, Tshisekedi a critiqué cette disposition, affirmant qu’elle permettrait une « vente » de la souveraineté congolaise à d’autres États africains.

Le président a également rejeté les critiques de l’opposition, qu’il accuse de n’avoir rien à proposer, et s’est montré ferme face à la société civile, notamment la conférence épiscopale du Congo, qui s’oppose au projet de révision. Tshisekedi affirme qu’il ne changera pas d’avis.

Cette posture laisse perplexe, d’autant qu’il continue de nier toute volonté de briguer un troisième mandat. Mais les doutes persistent.

Une vraie source d’inquiétude

Alors que la RDC est confrontée à une grave crise dans l’Est du pays, exacerbée par les tensions avec le Rwanda depuis 2022, ce projet pourrait encore aggraver les divisions. Dans un pays où les rivalités politiques, économiques et identitaires sont omniprésentes, une telle cristallisation des tensions pourrait s’avérer explosive.

Le spectre d’une « Nouvelle République » permettant un troisième mandat demeure une hantise pour beaucoup. Cette possibilité nourrit les inquiétudes, d’autant que les institutions congolaises peinent à inspirer la confiance nécessaire pour garantir une gouvernance éthique et respectueuse des textes.

Respecter les lois et garantir leur application dans l’intérêt commun reste un défi majeur en RDC. Comme l’a écrit Nicolas Machiavel dans Discours sur la première décade de Tite-Live : « Ce n’est pas le titre qui honore l’homme, mais l’homme qui honore le titre. » Ainsi, ce ne sont pas les institutions qui font les grands hommes, mais les hommes qui font les grandes institutions.

La RDC semble encore loin d’atteindre cet idéal. Et dans ce contexte, la révision constitutionnelle proposée par Tshisekedi risque d’attiser davantage les tensions que de résoudre les problèmes structurels du pays.

avec jeune afrique

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