Le Front citoyen Togo Debout (FCTD) et d’autres organisations de la société civile appellent dans un communiqué la Cedeao, qui a dépêché une mission d’information sur le processus électoral en cours au Togo à une prise de responsabilité devant la révision constitutionnelle en cours.
Extrait de leur note
Dans un premier communiqué en date du 15 avril 2024, la CEDEAO a annoncé une mission exploratoire au Togo, au vu des derniers développements en lien avec la gravité des réformes constitutionnelles controversés que le gouvernement prévoyait d’introduire. Le lendemain, un autre communiqué se substitue au premier et annonce plutôt une mission d’information et d’évaluation pré-électorale et n’évoque plus la grave procédure de renversement du régime constitutionnel initiée par le pouvoir togolais.
Cette volteface dangereuse, dénoncée sans ambages par nos organisations citoyennes et par le peuple togolais, dénote du malaise que suscite au sein de l’institution, cette énième forfaiture d’un pouvoir togolais, coutumier des tripatouillages constitutionnels. Elle témoigne aussi, de l’incapacité de cette institution à avoir une posture claire sur la question des coups de force institutionnel et constitutionnel, tout aussi délétères que les putschs, puisqu’ils désagrègent l’ordre constitutionnel, sapent les fondements de la démocratie et permettent le maintien au pouvoir de régimes autocratiques, comme celui au pouvoir au Togo depuis 57 ans, contre la volonté de son peuple; de plus, ces coups de force constitutionnels génèrent souvent des situations d’instabilité dans la région.
Dans la nuit du 25 mars 2024 en effet, l’Assemblée nationale du Togo, dont le mandat est arrivé à terme depuis fin décembre 2023, a procédé au renversement du régime constitutionnel de la IV République. Ce changement de Constitution s’est fait en catimini, sans consultation aucune de la Nation, par un Parlement caduc et en violation du Titre XIII de la Constitution de la IV » République. Aux termes du Titre XIII en effet, l’Assemblée nationale ne dispose que du pouvoir de révision de la Constitution et ne peut en aucun cas adopter une nouvelle Constitution, ni au cours de son mandat ordinaire, ni pendant le prolongement de celui-ci.
Cette manœuvre sibylline s’apparente à un vrai coup de force constitutionnel et viole les principes de convergence constitutionnelle inscrits dans le Chapitre I du Protocole A/SP1/12/01 additionnel de la CEDEAO sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance. Cette entreprise dissimule en réalité un projet de patrimonialisation et de confiscation du pouvoir par un régime systématiquement opposé à toute forme d’alternance démocratique à la tête du pays depuis bientôt six décennies. Faut-il encore rappeler que le Togo est le seul pays de l’espace CEDEAO à n’avoir jamais connu une alternance démocratique et qu’il demeure historiquement le seul pays à s’être opposé à deux reprises à la réforme du Protocole et à l’adoption de la disposition limitant les mandats présidentiels ?
Ce coup de force constitutionnel est clairement condamné par l’article 150 de la Constitution qui dispose que << Tout renversement du régime constitutionnel est considéré comme un crime imprescriptible contre la nation et sanctionné conformément aux lois de la République ».
Forts de ce qui précède, nous appelons la CEDEAO à une prise de responsabilité. Le monde salue aujourd’hui la beauté et les vertus de la démocratie sénégalaise, matérialisée par un modèle d’élection présidentielle. Comment accepter que dans le même temps, le Togo soit ce pays perpétuellement fermé aux normes et standards démocratiques, ce pays où les élections sont viciées, ce pays où on refuse systématiquement la proclamation par bureau de vote, ce pays où cette nouvelle entreprise hasardeuse risque de saper davantage les fondements d’une institution communautaire fragilisée par l’annonce du départ des 03 pays membres de l’AES ?
Le Togo ne peut plus être le mouton noir de cette institution et tout doit être mis en œuvre par la CEDEAO pour:
-l’arrêt de la procédure impopulaire, anticonstitutionnelle, illégale et illégitime de renversement du régime constitutionnel initiée par le pouvoir togolais
-la réforme urgente du Protocole additionnel A/SP1/12/01 sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance avec l’adoption de la disposition limitant le nombre de mandats pour le Chef de l’Etat, détenteur du pouvoir exécutif et qu’en 2025, le pouvoir togolais comprenne que l’alternance démocratique au Togo est une nécessité vitale pour le pays et un acte salvateur pour la région.