
Dans une lettre ouverte adressée à l’ancien président de la 4e République togolaise, un groupe d’enseignants-chercheurs issus des universités publiques du pays exprime son profond malaise face à la mise en place de la 5e République. Ils dénoncent un processus opaque, une gouvernance confuse et appellent à une refondation nationale à travers un « nouveau contrat citoyen ».
Une dérive institutionnelle dénoncée
La lettre, datée du 22 mars 2024 mais rendue publique ce 22 mai 2025, évoque une manœuvre politique « hasardeuse et risquée » orchestrée en dehors des principes républicains. « Le Togo est en faillite totale », écrivent les signataires qui dénoncent une initiative « menée par des individus sans légitimité scientifique ni morale, qui se réclament du corps des enseignants du supérieur ».
Dans leur missive, les universitaires pointent les dysfonctionnements liés à la transition politique : confusion des rôles au sommet de l’État, prolongation anormale du fonctionnement des institutions de la 4e République, absence de gouvernement formel, et surtout, concentration des pouvoirs entre les mains d’un seul homme.
« Une 5e République mort-née »
Pour ces universitaires, les faits sont clairs : la 5e République, officiellement proclamée, ne repose sur aucune base solide. « Toutes ces situations incongrues prouvent que la 5e République est mort-née », affirment-ils. Derrière cette réforme institutionnelle, ils voient la volonté « d’imposer au peuple une monarchie inédite au profit du fils du père » et d’éviter le verdict des urnes.
Selon eux, cette impopularité croissante du pouvoir en place explique le refus d’organiser des élections ouvertes et transparentes, malgré les vingt ans de règne déjà accomplis.
Un projet alternatif : le « nouveau contrat citoyen »
Face à cette situation, le collectif annonce l’élaboration d’un document intitulé « Cadre de réflexion pour un nouveau contrat citoyen du Togo : faire renaître l’espérance au Togo ». Le texte part d’un constat lucide : « Nous avons tous échoué, individuellement et collectivement. »
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Un appel à la responsabilité citoyenne
Le document plaide également pour un renouveau de la conscience citoyenne. Le citoyen du Togo nouveau doit, selon eux, être intègre, informé, tolérant, attaché aux valeurs républicaines, et engagé dans le développement collectif. Il doit « refuser toute forme de manipulation et d’achat de conscience », affirment les auteurs.
Les universitaires appellent à la création de cercles de réflexion et d’action à l’échelle locale pour alimenter la dynamique nationale. « Le foisonnement de compétences disponibles dans le pays doit être mis au service de la refondation », insistent-ils.
Une voix de plus dans un climat tendu
Dans un contexte marqué par une transition controversée et une opposition muselée, la prise de parole de ces intellectuels ajoute une voix dissonante au débat national. Leur proposition de « contrat citoyen » pourrait constituer une base de discussion pour d’autres forces vives du pays, en quête de réforme et d’alternance.