
Le lundi 14 avril 2025, la Scène Bella Bellow de l’Université de Lomé s’est transformée en un espace de mémoire, de résistance et de création artistique à l’occasion d’un spectacle inédit : un cabaret brésilien inspiré du roman Esclaves de Kangni Alem. Porté par la Coalition togolaise pour la diversité culturelle et la compagnie Gakokoé (France), ce moment artistique fort a convoqué littérature, théâtre, musique et danse pour revisiter l’un des chefs-d’œuvre de la littérature togolaise contemporaine.
Publié en 2003, Esclaves est une œuvre marquante de Kangni Alem, écrivain, dramaturge et professeur de théâtre à l’Université de Lomé. La pièce, que le public a regardé lundi dernier sur la Scène Bella Bellow de l’Université de Lomé, s’inspire bel et bien du roman Esclaves, dont le personnage principal est un « maître des rituels » qui officie à la cour du roi d’Abomey. Trahi et déporté au Brésil, il revient à Agoué non loin de Ouidah d’où il embarqua. Les amoureux du théâtre ont eu l’occasion d’assister à une représentation théâtrale dont l’esthétique est empruntée au concert-party. Une manière pour les comédiens et metteurs en scène de la pièce de parvenir à rire d’un sujet aussi grave que celui de l’esclavage.

La mise en scène du cabaret, à la croisée des cultures afro-brésiliennes et ouest-africaines, a offert une nouvelle lecture de cette œuvre dense, dans une ambiance festive, mais chargée de sens. Sur scène, les artistes de la compagnie Gakokoé ont su faire dialoguer les rythmes brésiliens avec les sonorités traditionnelles africaines, incarnées notamment par le “gakokoé“, instrument emblématique dont la double cloche métallique résonne comme un appel sacré, un cri venu du fond des âges. Grâce à la belle prestation des artistes, le public en sait un peu plus sur l’histoire et la vie des Afro-Brésiliens.
Le roman Esclaves est adapté au théâtre par l’auteur lui-même avec la complicité des metteurs en scène Marcel Djondo et Gaétan Noussouglo et des comédiens togolais et béninois. Parmi les comédiens togolais, deux sont issus du Master Théâtre Éducation de la Faculté des lettres, langues et arts (FLLA) de l’Université de Lomé.

Le spectacle Cabaret Brésil est une manière de rendre hommage à Kangni Alem, figure majeure de la scène culturelle togolaise. Fondateur de l’Atelier Théâtre de Lomé, primé à l’échelle africaine, il a marqué des générations d’artistes et d’étudiants par son œuvre foisonnante et engagée.
Fondée en 1998 à Montbéliard (France), la compagnie Gakokoé revendique un théâtre de proximité, ancré dans la parole et la transmission. Elle regroupe comédiens, musiciens, techniciens et créateurs animés par le désir d’entrer en résonance avec leur public. Ce projet autour de Esclaves illustre parfaitement cette démarche : créer du lien, interroger la mémoire, faire dialoguer les cultures.
Par cette initiative, l’Université de Lomé réaffirme son rôle de creuset culturel et de lieu d’expression artistique, où l’enseignement dialogue avec la création pour nourrir la réflexion et enrichir le vivre-ensemble.