Est-ce une hypocrisie française ? Paris continue d’acheter du gaz russe pour plus d’un milliard d’euros. Elle est d’ailleurs la capitale européenne qui en achète le plus.
Au cours des trois premiers mois de 2024, les livraisons de gaz naturel liquéfié (GNL) de Russie vers la France ont augmenté plus que vers tout autre pays de l’UE par rapport à l’année dernière. C’est ce qu’a rapporté Politico Europe en se référant au Centre pour la recherche sur l’énergie et la propreté de l’air (CREA), un think-tank finlandais.
Selon ses informations, Paris a versé à Moscou plus de 600 millions d’euros depuis le début de l’année, ce qui a suscité des critiques et des appels d’autres pays européens à réduire les achats. La France insiste sur le fait qu’elle livre une partie de ce gaz à d’autres pays européens et qu’elle est liée à la Russie par des contrats à long terme dont il est juridiquement difficile de se défaire.
L’accord actuel implique une importation significative de gaz naturel liquéfié (GNL) par la France et d’autres pays européens depuis la Russie, jusqu’à atteindre un volume de 4 millions de tonnes par an jusqu’en 2032. Bien que la France aspire à l’indépendance énergétique d’ici 2027, elle se trouve dans une position délicate vis-à-vis de ses contrats de GNL, surtout en contexte de sanctions européennes qui ne couvrent pas le GNL.
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Un représentant du ministère français de l’Économie a déclaré à Politico que l’augmentation des livraisons de gaz russe était en partie due aux grèves qui ont gravement perturbé les livraisons l’année dernière. Il a également souligné qu’il discutait régulièrement de la réduction des achats de GNL russe avec ses homologues de l’UE. Il a déclaré que le gouvernement étudiait d’autres sources d’approvisionnement possibles, mais que cela n’interviendrait pas avant 2027.
Des débats parlementaires en France mettent en lumière la complexité de la situation, avec des auditions de hauts dirigeants d’entreprises et de ministres pour discuter des implications de ces accords énergétiques. Le PDG de TotalEnergies, par exemple, est appelé à justifier la position de l’entreprise face aux exigences de décarbonation et de sécurité énergétique nationale. Ces discussions révèlent un embarras politique et une tension entre les intérêts économiques, la pression internationale pour réduire la dépendance aux ressources russes, et les objectifs environnementaux.
Enfin, l’énergie est au cœur d’un dilemme global impliquant des compromis entre l’autonomie énergétique, les engagements écologiques et la géopolitique. La France et d’autres pays européens sont pris dans un réseau de dépendances énergétiques complexe qui affecte leurs relations internationales et leurs politiques intérieures.
Cette situation est aggravée par la nécessité de naviguer entre les sanctions internationales, les impératifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et les urgences stratégiques de soutien à l’Ukraine, illustrant la difficulté de se démarquer d’un fournisseur historiquement dominant comme la Russie sans compromettre la stabilité économique et énergétique européenne.