
Élu à la tête de l’Autorité des chefs d’État de la CEDEAO, le président sierra-léonais entend redonner un souffle démocratique à une sous-région fragilisée par les putschs, les tensions sécuritaires et les défis économiques.
Réunis à Abuja le dimanche 22 juin 2025 pour le 67ᵉ sommet ordinaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les chefs d’État ont porté à leur tête Julius Maada Bio, président de la Sierra Leone. Il succède ainsi, pour un mandat d’un an, à Bola Ahmed Tinubu, président du Nigeria.
Dans un contexte où la CEDEAO traverse une des périodes les plus critiques de son histoire – marquée par une vague de coups d’État, des retraits successifs de pays membres, et une perte d’influence dans la résolution des crises régionales –, l’arrivée de Maada Bio à la présidence de l’organisation sous-régionale s’annonce stratégique.
« L’espace démocratique est sous tension »
Lors de son allocution d’investiture, le président sierra-léonais a dressé un tableau sans complaisance de la situation en Afrique de l’Ouest. « L’Afrique que nous dirigeons aujourd’hui est confrontée à de sérieux défis, certains existent depuis longtemps, d’autres sont nouveaux et en évolution », a-t-il affirmé devant ses pairs, conscient de l’ampleur de la tâche.
Déplorant les multiples interruptions de l’ordre constitutionnel – au Mali, au Burkina Faso, au Niger et en Guinée – Julius Maada Bio a rappelé que « l’espace démocratique est sous tension », appelant à une relance des principes fondateurs de la CEDEAO. « Nos citoyens, en particulier les jeunes, exigent des élections crédibles, mais aussi de la responsabilité, de la transparence et une participation équitable à la vie nationale », a-t-il insisté.
Quatre priorités pour son mandat
Le nouveau président de l’Autorité des chefs d’État de la CEDEAO a annoncé que son mandat s’articulera autour de quatre axes majeurs :
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Le rétablissement de l’ordre constitutionnel dans les pays membres dirigés par des juntes militaires ;
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Le renforcement de la démocratie et des institutions électorales ;
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La revitalisation de la coopération régionale en matière de sécurité, dans un espace de plus en plus marqué par le terrorisme, les conflits intercommunautaires et les trafics transnationaux ;
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La relance économique régionale, à travers une meilleure coordination face aux défis partagés : inflation, insécurité alimentaire, crise énergétique, endettement croissant.
Un leadership attendu
Julius Maada Bio, 60 ans, ancien militaire reconverti en homme d’État, est à la tête de la Sierra Leone depuis 2018. Son expérience du pouvoir et sa posture modérée au sein des débats régionaux pourraient lui permettre de jouer un rôle de médiateur dans les rapports souvent conflictuels entre États membres.
Sa présidence intervient à un moment où l’avenir de la CEDEAO se joue également sur le front diplomatique : la récente rupture avec les régimes militaires du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger), regroupés sous l’Alliance des États du Sahel (AES), a fragilisé la cohésion régionale. Le retour au dialogue avec ces pays, bien que non encore acté, demeure un enjeu stratégique pour le nouveau président en exercice.
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