Santé

Togo : l’assurance maladie universelle, un chantier à la fois social et structurel

 Si l’accès aux soins de santé reste un défi majeur dans de nombreux pays africains, le Togo entend bien prendre le contrepied de cette réalité. Avec la mise en œuvre progressive de l’Assurance Maladie Universelle (AMU), le pays ne se contente pas de garantir un droit : il bâtit un système robuste pour le rendre effectif. Une démarche qui passe par l’anticipation, l’investissement dans les infrastructures et la réorganisation du personnel médical.

Avant de rendre gratuite l’accès aux soins dans les hôpitaux publics, encore fallait-il que ces structures soient capables d’accueillir, de soigner et de prendre en charge dignement les patients. Car comme l’explique un responsable du projet : « plus on dira aux gens que les soins sont gratuits, plus ils afflueront vers les centres de santé. Et si ces centres ne sont pas prêts, on va droit vers une impasse. »

C’est donc dès 2021 que l’État togolais a commencé à réhabiliter les infrastructures vétustes et à en construire de nouvelles, notamment dans les régions les plus reculées. Une manière d’anticiper l’augmentation inévitable de la demande en soins, mais aussi de prévenir la surcharge du personnel médical déjà inégalement réparti sur le territoire.

Des chiffres qui parlent

Les résultats sont déjà visibles. Rien que dans la région des Savanes – une des plus enclavées du pays et marquée par des défis sécuritaires – 60 centres de santé ont été rénovés et 16 nouveaux construits. À l’échelle nationale, ce sont 86 nouvelles formations sanitaires qui sont en construction, dont certaines déjà opérationnelles. La région de Kara compte ainsi une vingtaine de nouveaux centres, tandis que les Plateaux en comptent près de 35.

Parallèlement, l’État a investi massivement dans le rééquipement du plateau technique : lits médicaux, équipements de laboratoire, de radiologie, échographes, scanners, mais aussi ambulances pour faciliter les transferts. « Aujourd’hui, dans beaucoup de centres de santé, le diagnostic peut se faire plus vite, avec des équipements modernes », précise-t-on du côté du ministère de la Santé.

Former et déployer le personnel

Mais des infrastructures sans personnel qualifié ne suffisent pas. Conscient de cet enjeu, le gouvernement mise sur la formation et le recrutement de nouveaux professionnels de santé. Outre l’historique faculté de médecine de Lomé, une nouvelle école a vu le jour à Kara. Dans chaque région, des instituts forment infirmiers, sages-femmes, kinésithérapeutes et techniciens.

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En parallèle, l’État procède à des vagues de recrutement : la dernière en date remonte à l’année précédente, avec de nouveaux concours annoncés pour 2025. Objectif : réduire les « déserts médicaux » et garantir une répartition équitable du personnel sur tout le territoire.

Un système structuré autour de deux piliers

La mise en œuvre de l’Assurance Maladie Universelle repose sur deux entités :

  • L’INAM (Institut National d’Assurance Maladie), déjà opérationnel depuis plus de dix ans pour les fonctionnaires, retraités et agents publics.

  • La CNSS (Caisse Nationale de Sécurité Sociale), chargée depuis peu de la couverture des travailleurs du secteur privé formel.

Restent encore à intégrer les travailleurs non salariés et ceux du secteur informel, qui constituent la majorité de la population active. Mais là encore, le processus est décrit comme « progressif mais irréversible ».

Un impact structurel et social

Derrière ces chantiers, l’État togolais vise un double impact. D’abord, rapprocher les soins des populations en construisant des centres de santé dans toutes les régions, même les plus enclavées. Ensuite, alléger la charge financière que représente la maladie, grâce à la suppression des paiements directs pour les soins couverts par l’assurance.

À terme, « aucun Togolais ne doit se sentir oublié ou exclu de l’accès à la santé », martèle un cadre du ministère de la Santé. D’ici cinq à dix ans, les résultats devraient être visibles dans les indicateurs de santé publique : baisse de la mortalité maternelle et infantile, amélioration du taux de consultation, allongement de l’espérance de vie.

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