Quatre ans après la promulgation de loi portant nouveau code de justice militaire, les juridictions militaires tardent à se concrétiser. Mais face aux exactions dont sont souvent responsables certains éléments de la famille militaire et sécuritaire, le gouvernement doit accélérer les procédures.
« S’il pense connaître quelqu’un qu’il aille l’appeler. Quelle punition, je n’ai jamais eu ou qui ne finit pas », c’est en ces termes discourtois et indignes de son habit porté qu’exprimait un gendarme en faction devant le palais des congrès de Lomé mercredi 20 mai après-midi. Selon cet élément sûr de lui, tout ce qu’il fait est juste parce que la « raison du plus fort est toujours la meilleure ». Pas forcément! Comme ce gendarme Abou, ils sont nombreux à être grossiers vis-à-vis des civils, même s’ils ont tort, la tendance observée leur donne toujours raison devant le chef. « Le policier ou le gendarme a toujours raison. Après les faits, c’est ce qu’il rapporte qui est automatiquement taxé de crédible, sans qu’un bénéfice du doute ne soit accordé au civil » se désole un citoyen, victime d’un abus policier sur la route ce lundi là.
Jeudi 21 mai, un autre incident cette fois-ci mortel intervenu au carrefour sun city dans le quartier Avédji à Lomé s’est ajouté à la liste. Un jeune débrouillard a été abattu par un élément des forces de défense et de sécurité.
Selon un communiqué du ministre de la sécurité, Général Yark Damehane, l’incident s’est produit suite à une vive altercation entre la victime et deux militaires à moto. « A la suite de cette violente dispute, un fonctionnaire de police en service dans les environs a dû dans des circonstances non encore explicables fait usage de son arme atteignant ainsi mortellement cet automobiliste », indique le communiqué.
Lire aussi-Lancement des travaux de l’usine de production d’habillement militaire au Togo
Une enquête est certes ouverte, mais connaissant le sort réservé aux précédentes, le pessimisme a gagné les esprits des togolais. « Encore une enquête ouverte », se questionne les citoyens, qui remémorent les nombreuses investigations annoncées par le ministre de la sécurité dans ses communiqués lus sur la chaîne nationale.
La rigueur de la loi
Pour ramener la sérénité et discipliner certains éléments qui continuent de saper les efforts de modernisation et la cordiale relation qui devrait exister entre un corps habillé et un civile, le gouvernement doit « aller jusqu’au bout de la réforme de l’appareil sécuritaire entamé », selon un observateur. Et l’opérationnalisation des juridictions militaires prévues par le nouveau code militaire adopté en 2016 pourrait être la voie royale. Selon le texte consulté par 24heureinfo, le tribunal militaire, juridiction de premier degré se compose de deux chambres, la première correctionnelle et la seconde criminelle. A cela s’ajoute, la cour d’appel militaire qui est le second degré de juridiction en matière de justice militaire. Sont justiciables des juridictions militaires, les militaires des forces armées togolaises et les personnels des corps paramilitaires relevant du ministère chargé de la sécurité, en activité, en service détaché, en position de non activité ou en position hors cadre, les personnes assimilées, les personnels de la réserve opérationnelle puis les prisonniers de guerre.
Lire aussi-Frontière Togo-Benin : un passeur clandestin tué par un militaire à Agouégan
Plusieurs infractions sont incriminées d’une peine de 6 mois jusqu’à la radiation selon les faits. Par exemple, la loi punie de six (06) mois à cinq (05) ans d’emprisonnement, tout militaire ou assimilé qui, hors le cas de légitime défense de soi-même ou d’autrui, exerce des violences sur un subordonné. Aussi, tout militaire qui, pendant le service ou à l’occasion du service, par paroles, gestes, menaces ou écrits, outrage un subordonné gravement et sans y avoir été provoqué, est puni de six (06) mois à un (01) an d’emprisonnement. D’autres infractions propres au corps sont également punies et très sévèrement comme la révolte, l’indiscipline, les abus notamment.
Son application réelle pourrait dissuader les récalcitrants membres du corps et permettre de repolir l’image des Forces de défense et de sécurité, aujourd’hui « écornée » devant l’opinion, selon un cadre de l’appareil sécuritaire.